POLITIQUE--REPRESSION : LA CHASSE AUX SORCIERES A COMMENCE
Après le mouvement populaire de revendications sociales qui a secoué le pays, l’heure est aux représailles.
Une semaine après les émeutes du 23 février dernier au quartier Dakar à Douala et le mouvement populaire de revendications sociales, le pays revit de nouveau, après une paralysie de plusieurs jours. Cependant, tous les Camerounais ne vaquent pas toujours à leurs occupations quotidiennes. D’aucuns ont été tués dans différents fronts à travers le pays. Certains, par milliers, ont été interpellés et jetés dans les cellules de commissariats de police, de brigades de gendarmerie ou encore dans les multiples prisons du pays. En l’espace de 48 heures, selon certaines indiscrétions, la prison centrale de Douala à New-Bell a accueilli plus de 80 nouveaux pensionnaires. La reprise des activités n’est pas l’hirondelle qui annonce le printemps. Au contraire. Une véritable chasse aux sorcières a commencé au Cameroun pour débusquer “ les apprentis sorciers qui dans l’ombre ont manipulé ces jeunes ” (dixit Paul Biya).
Moins d’une semaine après la sortie du président de la République, une opération de tri est engagée depuis le week-end dernier pour isoler “ les brebis galeuses ” du reste du troupeau. Paul Eric Kingue, maire élu de Penja et responsable local du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc), a de gros soucis aujourd’hui. Par l’arrêté n° 00033/A/Minatd/Dctd du 29 février 2008, le ministre de l’Administration territoriale et de la décentralisation (Minatd), Marafa Hamidou Yaya, a suspendu ce magistrat municipal de ses fonctions pour une durée de 3 mois. Officiellement, on lui reproche l’ “ utilisation des deniers publics de la commune à des fins personnelles ou privées ” et “ faux en écriture publique authentique ” aux termes de l’Art. 106 (1) a)b)c) de la loi n° 2004/018 du 22 juillet 2004 fixant les règles applicables aux communes. Toutefois, d’autres sources révèlent que le péché mignon de Paul Eric Kingue serait ailleurs. La hiérarchie de son parti n’aurait pas apprécié sa trop grande liberté de ton dans son récit sur les tueries dans sa commune au cours du mouvement populaire de revendications sociales. Aux dernières nouvelles, il serait en garde-à-vue à Nkongsamba.
Lambo Sandjo Pierre Roger, plus connu sous le nom d’artiste de Lapiro de Mbanga, connaît aussi des soucis. Ce candidat aux dernières élections municipales dans les rangs du Social democratic front (Sdf), joint au téléphone par Le Messager dimanche dernier, 2 mars, vers 22 heures, a affirmé qu’il se rendrait à Nkongsamba lundi 3 mars. Il devrait y être entendu. “ Ndinga man ”, l’auteur de “ La Constitution constipée ”, “ Kop nye ”, “ Big kachika for Ngola ”, “ Mimba we ”, etc., est accusé d’être l’instigateur du mouvement qui a dégénéré en casses et émeutes à Mbanga. Sa caméra dont il se servait pour immortaliser les faits, a été cassée par la flicaille.
Acharnement et persécution
Parmi les Camerounais en mauvaise posture aujourd’hui, il y a le président provincial du Sdf pour le Littoral. Jean Michel Nintcheu, député Sdf, est accusé d’avoir mis le feu aux poudres samedi 23 février dernier au quartier Dakar à Douala. Son passeport lui a été retiré dimanche dernier alors qu’il tentait de se rendre à l’étranger “. Depuis samedi dernier, le combattant nationaliste, Mboua Massock ma Batalong, est porté disparu. Ses proches sont inquiets pour sa sécurité. Ils ont perdu de ses traces peu avant l’heure du meeting qu’il avait programmé au carrefour Shell New-Bell à Douala. Depuis lors, son téléphone ne répond plus. Il est coupé de tous contacts. Son fils, Massock ma Mboua Massock, qui ne le quitte presque jamais, redoute que son père de combattant qui mène une bataille pour le départ de Biya du pouvoir, n’ait été kidnappé par les flics. Une rumeur persistante l’annonçait à la prison centrale de Douala à New-Bell. Mais selon des sources bien introduites dans cette maison d’arrêt, “ le père des villes mortes ” n’y serait pas. Le 16 février dernier, arrêté à Bependa à Douala, en compagnie de son fils et de Elisabeth Ngo Eheg (Aïcha), il a été transporté nuitamment vers Bonepoupa et abandonné dans la forêt à une centaine de kilomètres de Douala.
Source: le Messager