Cameroun / Un séjour en France à 900 000 euros
Le séjour estival du président camerounais Paul Biya dans deux prestigieux hôtels en France, où il aurait dépensé près de 900 000 euros, a provoqué une intense polémique au Cameroun, ouvrant pour la première fois un large débat autour de sa fortune.
Paul Biya est retourné dans son pays le 5 septembre après trois semaines de vacances dans la station balnéaire de La Baule.
Le chef de l'État et sa suite d'une quarantaine de personnes ont occupé 43 chambres dans les prestigieux hôtels L'Hermitage et Le Royal, du groupe Lucien Barrière, dépensant près de 900 000 euros, selon les médias français.
Depuis, ces révélations, largement relayées au Cameroun, provoquent des réactions controversées.
Le gouvernement et le parti au pouvoir, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), sont montés au créneau, dénonçant un « complot médiatique ».
Fin juin, la publication d'un rapport écrit par une ONG française, le Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD), sur les « biens mal acquis » de M. Biya, avait été aussi vertement accueillie par le pouvoir. Et la presse camerounaise avait multiplié les articles sur le sujet.
« Il ne
fait que piller le peuple camerounais »
Avec ces deux affaires,
« c'est la première fois que le débat autour de la fortune du président Biya prend une telle ampleur », note le sociologue camerounais Claude Abé.
« Depuis son accession au pouvoir en 1982, Paul Biya et ses acolytes ne font que piller le peuple camerounais », accuse le chef du principal parti d'opposition, John Fru Ndi.
Bernard Muna, un autre opposant, leader de l'Alliance des forces progressistes (AFP), a accusé le président de la République d'avoir dilapidé l'argent public. « Dépenser [une telle
somme] en pleine crise » constitue « un vrai gaspillage pour notre pays », a-t-il affirmé.
A ce jour, ni le gouvernement ni le groupe hôtelier Lucien Barrière, qui a qualifié d'« inexactes » « les informations diffusées » sur les vacances du président, n'ont
apporté de précisions sur la facture réelle de ce séjour.
« Tout ce que j'ai dit, je le maintiens », a affirmé le journaliste français Anthony Torzec, auteur de l'enquête sur le désormais célèbre séjour présidentiel à La
Baule.
Habitué à séjourner pendant de longues semaines à l'étranger, Paul Biya aurait pu éviter cette polémique s'il avait choisi
de prendre ses vacances au Cameroun, remarque le quotidien privé Le Jour. Le journal proposait mardi d'offrir un guide touristique au président, lui faisant « 10 propositions pour passer des
vacances (à moindre coût) au Cameroun ».
Le Jour cite entre autres sites touristiques la ville balnéaire de Kribi, dans le sud du pays, qu'il compare à La Baule et à la Côte d'Azur. Kribi a l'avantage d'être proche de Yaoundé et ses
hôtels proposent des prix très attractifs, « la suite présidentielle la plus chère » n'excédant pas « 100 000 FCFA » (152 euros) la nuit, explique avec ironie Le
Jour.