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Publié par Delphine E. Fouda

  Le messager Jean Marc Soboth, 29/05/2008. La compagnie nationale mettra la clé sous le paillasson demain. Un des plus gros échecs du système Biya. Camair.co tarde à entrer en scène.

Le travail est fini à la Camair

La compagnie nationale mettra la clé sous le paillasson demain. Un des plus gros échecs du système Biya. Camair.co tarde à entrer en scène.


Hier, mercredi 28 mai 2008, aux environs de 18h, des personnels navigants de Cameroon Airlines (Camair) ont reçu dans leur téléphone portable un Sms. Ce dernier annonce une vente aux enchères devant avoir lieu le 31 mai dans les locaux de la compagnie. Il s’agira probablement de brader ce qu’il y reste de mobilier et de matériel de bureau. C’est dans la journée du mardi 27 mai que ce personnel, qui n’a pas de salaire depuis trois mois, a définitivement déchanté. Ils ont été officiellement informés que la compagnie fermait ses portes justement le… samedi 31 mai.
En attendant Camair.co, l’autre compagnie dont on ne sait toujours pas grand-chose du chronogramme des activités, les personnels seront appelés à un autre type de recyclage : l’attente à la maison. Pas moins de 400 responsables de familles pourraient ainsi se retrouver dans la rue. Sans être sûr de l’avenir immédiat ! Les cadres de la compagnie n’en reviennent pas. Un technicien qui y a passé plus de deux décennies a promis de « pleurer à chaudes larmes le jour fatidique ». D’autant que le nouveau directeur général, Adolphe Sammet Bell, n’avait pas tari d’assurances à l’endroit du personnel et du public, alors que de multiples alertes sur la situation technique de la compagnie, à l’international, y entamaient déjà la sérénité.

Descente aux enfers
Au moment où une série de scandales adjacents berçaient la société via l’opération Epervier, l’Association internationale des transports aériens (Iata), elle, n’arrêtait de s’interroger sur la suspecte opiniâtreté pour le maintien en vie de la Camair dont la retrait du code est déjà envisagé. Ce faisant, le principal appareil de la compagnie, le Boeing 767 (« Le Dja »), restait scotché au sol à Douala durant douze semaines environ, au mépris des exigences techniques en la matière. D’après des sources dignes de foi, la Ccaa (Cameroon civil authority) s’y est mêlée. Elle a retiré, entre autres, le certificat de navigabilité de cet appareil qui fut si souvent utilisé par le chef de l’Etat, Paul Biya, en personne. Cette situation de léthargie dont les techniciens avaient, en son temps, saisi la plus haute hiérarchie de l’Etat viendra compliquer davantage le litige latent - mais complexe - que les dirigeants de la Camair entretiennent depuis quelques années avec les loueurs australiens de Ansett Worldwide, vrais propriétaires de l’appareil « confisqué ».
D’après des spécialistes interrogés, « l’arrêt ainsi décidé risque d’être fatal à la prochaine compagnie aérienne, la Camair.co, au plan de la navigabilité de la flotte et de la compétence des personnels ». Au plan juridique, l’arrêt subit entrepris devrait autoriser, au compte du liquidateur, le cabinet Bekolo and Partners (confirmé le 15 mars dernier), d’exorbitantes prérogatives qui peuvent s’avérer négatives. Et dont la moindre ne serait pas l’aptitude à céder les immeubles et les onéreux stocks de pièces détachées, officiellement « pour faire face aux créances ». En somme, la gabegie à la façon de l’Oncpb de triste mémoire…

Un échec retentissant…
D’après une indication de la tutelle qui entend se soustraire à cette « débâcle qui aura des répercussions certaines dans l’avenir », la nouvelle donne à la Camair a été imaginée par le nouveau ministre des Finances, Essimi Menye. Selon nos sources, ce dernier entendait, au départ, s’enquérir de l’utilisation effective de la lourde subvention versée mensuellement par l’Etat à la Camair sous administration provisoire. Cela, étant donné que cette alternative initiée par son prédécesseur, Polycarpe Abah Abah, n’admettait aucun type de contrôle efficient. Cette brève inquisition a débouché sur la recherche des recettes des guichets Camair sous administration provisoire. Il s’agissait également d’envisager la renégociation des loyers des aéronefs dont on avait cru qu’ils furent obtenus en option de location-vente.
Aujourd’hui, l’on en est à un autre scénario plus réaliste : celui du constat de la mort d’une vache à lait publique pour laquelle divers experts n’ont eu de cesse de proposer, pendant des années, des solutions de sauvetage, devant s’inspirer des compagnies européennes qui, comme la Camair, sont passées par la banqueroute il y a plus d’une décennie.
Si la conduite de la transition et la mise en route de Camair.co ne sont pas conduites avec la prompte et dispendieuse élégance qu’exige la fierté de tout un peuple – ce qui permettrait d’oublier plusieurs années de dégradante agonie – , la mort de la Camair se révèlera « l’un des échecs les plus retentissants d’un système Biya qui a la réputation d’avoir patiemment détruit les héritages stratégiques de son prédécesseur, le président Ahidjo » (dixit un politologue bien connu).
Un échec d’autant plus symbolique qu’entre-temps, la concurrence a rapidement occupé le précieux espace abandonné : les compagnies étrangères au Cameroun sont passées, d’après les voyagistes, de 23 vols journaliers au départ du Cameroun à 56 vols, c’est-à-dire du simple au double. Mieux, des pays plus jeunes dans le transport aérien comme le Congo Brazzaville et le Tchad se veulent désormais mieux lotis que l’ancêtre camerounais. Sur la scène internationale, ils démontrent au quotidien leur capacité à gérer des compagnies aériennes nationales, en l’occurrence TAC (Trans Air Congo) ou encore Toumaï Air Tchad (TAT)...
 

Par Jean Marc SOBOTH (Correspondance particulière)

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