Cameroun : 1600 détenus de la prison de New-Bell relogés dans des hangars
Patient Ebwele, Le jour, 02/09/2008.Les
responsables du pénitencier font ce qu’ils peuvent pour caser les prisonniers après l’incendie.
Le bilan de l’incendie meurtrier du 20 août 2008, à la prison centrale de Douala s’est alourdi vendredi dernier, avec la mort de deux détenus.
Les nommés Essend et Youmbi faisaient partie du groupe des blessés graves admis au service des brûlés de l’hôpital général de Douala. Leur décès porte à quatre le nombre de brûlés morts, après l’incendie qui lui-même avait fait 09 morts et 78 blessés. Pour l’instant, le bilan provisoire est de 13 morts. Ce bilan pourrait s’alourdir, a-t-on appris de sources médiales. D’autres brûlés graves étant en observation. L’hôpital Laquintinie en compte sept et l’hôpital général de Douala, onze. Les cas moins inquiétants (58 blessés) sont pris en charge par l’infirmerie de la prison centrale de New Bell.
Depuis le sinistre, la situation au sein du pénitencier demeure préoccupante. Pour loger dans l’urgence les quelques 1600 détenus qui occupaient le compartiment "Spécial régime", ravagé par les flammes, deux hangars (des piquets et une charpente recouverte de tôles) ont été construits. Les travaux de construction ont été supervisés par le directeur des affaires générales de l’administration pénitentiaire. La construction de ces hangars avait été décidée par le ministre de la Justice garde des sceaux Amadou Ali, à l’issue de sa mission de crise à Douala. Coût des travaux : 10 millions Fcfa.
A la prison de New Bell, l’incendie du mois dernier, n’est venu qu’aggraver une situation déjà très précaire. Surpopulation carcérale, insalubrité, insécurité, et trafics de tous genres, y ont fait leur lit. Mais, la situation est plus grave qu’elle ne paraît. "Plus d’un millier de détenus à New Bell sont sans cellules et dorment en plein air", affirme sous anonymat un responsable de la prison. A la tombée de la nuit, les détenus sans-abri sont parqués dans la grande cour. Celle-ci est entourée d’une grille. "Certains se couchent à même le sol, et d’autres sur des nattes ou des morceaux de cartons", affirme notre source.
Avec la saison des pluies, la vie s’apparente à un calvaire au sein de la prison. Lorsqu’il pleut, les détenus se serrent les uns aux autres, contre les murs pour se protéger. Dans les cellules, ils sont parfois regroupés par vingtaines, dans des espaces de quelques mètres carrés. Il n’existe pas une délimitation précise entre différentes catégories de détenus. S’il y a des compartiments affectés aux femmes et aux mineurs, ceux-ci côtoient au quotidien des dangereux criminels. Aussi, les cas de viols sur mineurs et d’agressions sont-ils légions.
Cependant, les seuls privilégiés dans cet environnement austère, sont les détenus de la spéciale 18. Le compartiment qui accueille les hauts cadres de l’administration accusés ou condamnés pour détournement de deniers publics. On y retrouve bien au frais : Edouard Etondè Ekoto, l’ancien Pca du Port autonome de Douala (Pad) ; Lamine Mbassa, son ex collaborateur à la communauté urbaine de Douala (Cud), mis en détention dans le cadre de l’affaire de l’emprunt obligataire de la Cud ; Simon Pierre Ewodo Noah le Dga du Pad, Siewe Nitcheu cadre du Pad ; Zaccheus Forjindam, l’ex Dg du Chantier naval et industriel.
Les gros bonnets de New Bell jouissent de nombreux avantages : chambre à part et climatisés, réfrigérateurs, cuisine, espace de jeu…Aménagés à leurs frais.
Autour de la prison, on observe ces jours-ci un relâchement dans le dispositif de surveillance mis en place à la suite de l’incendie. Les gendarmes n’y sont plus postés en faction. La police et la gendarmerie effectuent cependant des patrouilles motorisées de manière régulière autour de la prison, la nuit tombée. Si le calme est revenu. Les responsables de la maison d’arrêt, se méfient de l’éventualité d’une nouvelle tentative d’évasion. A cet effet, les gardiens ont été conviés à faire preuve de vigilance.
Bon à savoir, la prison centrale de New Bell a un effectif carcéral évalué à environ 4.000 détenus. Pour près de 250 gardiens. Elle a été construite autour des années 30. Sa capacité d’accueil est de 800 personnes.