Cameroun-les 30 gouvernements de Paul Biya
Denis NKwebo,
Le Jour, 08/10/2008.Un gouvernement tous les 16
mois
En 26 années de pouvoir, Paul Biya a formé en tout 30 gouvernements. Sont compris dans cette série assimilable à un jeu de rotation « sur place », ce qu’on a souvent appelé
réajustements ministériels, dans le jargon des milieux du pouvoir de Yaoundé.
La moyenne qui s’en dégage exprime dans une large mesure, les clés d’un jeu politique aux allures de charme d’opinion. Les cabinets sont revus et corrigés, tous les 16 mois, à peu près. Cette moyenne a été régulièrement rompue, aux premières heures de l’ère du renouveau, notamment entre 1982 et 1990 où il y a eu 14 mouvements ministériels. En 1983, il y a eu trois gouvernements, contre deux en 1984. Cette période coïncide avec les soubresauts de la transition, alimentés par la tentative de l’ex président Ahidjo de reprendre la main sur le pouvoir qu’il entendait contrôler à travers le parti Unc.
Le clou de cette instabilité et cette tension
politique étant le coup d’Etat d’avril 1984. D’ailleurs, il y eu un remaniement deux mois avant le putsch et un autre quatre mois après.
A en juger par les intervalles qui séparent les différents gouvernements formés par le président Biya, il est difficile de cerner avec précision, les rapports que le président entretien avec son
peuple. Chaque fois, les Camerounais scrutent le ciel de la république, dans l’attente d’une hypothétique décision de faire ou de défaire tel ou tel ministre. Paul Biya emprunte-t-il aux
florentins qui pensent que pour bien gouverner, il faut « jouir du bénéfice du temps » ? C’est qui est sûr, c’est que le chef de l’exécutif camerounais, du 6 novembre 1982 à nos jours, a souvent
gagné du temps, en toute chose. Aussi retrouve-t-on le portrait robot du président national de Rdpc, dans la phrase fétiche de Machiavel. Où le maître de la dialectique dit qu’il se conformera «
à la vérité effective de la chose, et non aux imaginations qu’on s’en fait ».
En réalité, le rythme des gouvernements de Paul Biya est à la fois flou, lent, incertain. Et finalement incohérent d’un point de vue politique. La première moitié du renouveau a donné l’occasion à son initiateur, de régler les comptes de la transition. En utilisant et en usant les hommes de compagnie politique, à l’effet de récompenses. Puis, depuis 1991, les alliances et les contre alliances ont pris le relais dans le système. Si bien que, ces dernières années, les remaniements ministériels s’entourent de mystères. Et de simples supputations, plus ou moins proches de vrais exercices de divination.