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Publié par Delphine E. Fouda

 Cyrille Ekwalla, www.cameroonvoice.com , 24/10/2008. Invité au Forum économique, c'est son ministre de l'économie qui l'a représenté au pied levé.
Dans la foulée du XIIè Sommet de la Francophonie à Québec du 17 au 19 octobre, la province francophone du Canada a abrité un autre sommet le 21 octobre dernier à Montréal. Sommet économique cette fois et intitulé "L'Afrique francophone : une économie en pleine croissance ".
Une initiative du Conseil canadien pour l'Afrique (CCA) : un regroupement de femmes et d'hommes d'affaires canadiens et africains, dédié à la promotion des échanges commerciaux et des investissements entre les communautés d'affaires canadiennes et africaines, et qui existe depuis 2002. Parmi les entreprises-membres du CCA, on peut citer Rio Tinto Alcan, SNC Lavallin (l'un des plus grands groupes au monde d'ingénierie et construction), Desjardins Développement International, etc... Les convives de ce mini-sommet étaient les Premier-ministres Bernard Mazuka du Rwanda, Seyni Oumarou du Niger et Ahmed Tidiane Souare de la Guinée, le vice-président Yves Shahinguvu du Burundi et les trois chefs d'État: Marc Ravalomanana de Madagascar, Blaise Compaoré du Burkina Faso et Paul Biya du Cameroun.

Tous les invités ont répondu présents sauf ...Paul Biya du Cameroun. Le président camerounais a envoyé trois ministres à sa place: Lazare Essimi Menye (Finances), Louis Paul Motaze (Economie, Planification et Aménagement du territoire) et Luc Magloire Mbarga Atangana (Commerce). C'est peu dire que la déception fut grande.

Lorsque son absence fut annoncée aux organisateurs et notamment à Lucien Bradet, président du CCA, il aura fallu toute la force de persuasion et les talents de négociatrice de Mme Amina Gerba ( camerounaise, membre du CCA et Directrice Générale de Afrique Expansion Mag), aidée en cela par M. Etoa Etoa J. Bosco (Conseiller culturel auprès du Haut-Commissariat du Cameroun au Canada) pour ne pas faire annuler la présentation du Cameroun.

Les organisateurs de cette rencontre se sont sentis " peinés par le désistement à la dernière minute du président Biya... " selon Lucien Bradet. Et de rajouter : "... nous devons faire face à certains engagements contractuels ". En effet, le CCA, en tant qu'organisation privée, doit, pour être capable d'organiser ce type de rencontres, solliciter des partenariats. Par cette absence, c'est la crédibilité de l'organisme qui est en jeu. Cette déception des organisateurs a été partagée par de nombreux participants, mais surtout par les camerounais (entrepreneurs, étudiants-doctorants, médias) qui alternaient dans leurs réactions entre dépit et honte: "Popol vient encore de shit le pays", "C'est vraiment un faux type" d'une part et d'autre part, une forme de lassitude, de fatalisme : "...ahhh !! Avec lui, on est habitué".

Déception et tension


C'est dans cette ambiance de déception et de tension palpable que le trio ministériel camerounais a fait son entrée dans la salle de conférence. Le préposé à la parole fut Louis Paul Motaze, qui, en un tour de passe ?passe, a désamorcé la tension et détendu l'atmosphère lourde qui régnait dans la salle. Etait-ce une boutade ou était-il sérieux ? Toujours est-il qu'en voulant illustrer la stabilité du Cameroun, il a évoqué le règlement pacifique du conflit de Bakassi et qui, selon lui, aurait justifié que le Prix Nobel de la Paix 2008 soit attribué à Paul Biya. Ce qui a provoqué des éclats de rire dans l'assistance.
 
Normalement prévue pour une demi-heure, la présentation du Cameroun a duré 8mn chrono sans film publicitaire ou diapositives (contrairement aux autres pays) pour soutenir les propos du ministre de l'économie. On apprenait donc que le Cameroun venait de changer sa politique économique. Après avoir atteint le point d'achèvement PPTE, donc réduit l'endettement, le gouvernement camerounais a surtout mis l'accent sur la répartition afin de réduire les inégalités sociales. Dorénavant, l'emphase sera mise sur la production, qui elle, génèrera des revenus, redistribuables après coup.

En un mot, la production primera dorénavant sur la répartition. Il est à noter qu'aucune donnée chiffrée n'a été émise. Lorsque nous avons interrogé le ministre des Finances Essimi Menye quelques minutes après la conférence, sur d'éventuelles incitations fiscales pour investisseurs, c'est avec une attitude hautaine dont il ne s'est pas départi tout le long de son séjour montréalais, - à la limite du mépris ? qu'il asséné sa réponse : " ...tout cela est dans la Charte des investissements (...) vous n'avez qu'à la consulter".

Court, précis et efficace, l'exposé de Louis Paul Motaze a été salué par toute l'assistance. Sa maîtrise de l'art oratoire a sauvé l'image du Cameroun au point de faire oublier que c'est le président Pau Biya qui aurait dû parler à sa place.

A-t-il réussi à "vendre" le Cameroun? A-t-il suscité des envies d'investir au Cameroun de la part de celles et ceux, dont c'est le métier, et qui étaient dans la salle ? Seul l'avenir le dira. Et pour reprendre les propos de Lucien Bradet du CCA "... c'est un travail de longue haleine, brique par brique... l'objectif de cette rencontre était de sensibiliser et d'encourager les Canadiens à investir dans une Afrique qu'on connaît peu au Canada, l'Afrique francophone économique; faire en sorte que les Canadiens prennent de plus en plus part au développement de ces pays...".

 Il faut juste espérer pour le Cameroun que ce type d'incident se ne répète pas très souvent, car il y va aussi de la crédibilité des entrepreneurs camerounais vivant au Canada qui se voient ainsi entacher.
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