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Publié par Vincent Sosthène FOUDA – Socio-politologue

40 jeunes camerounais ont passé la nuit de samedi à dimanche (15 au 16 août) soit en cellule soit au hall du commissariat du 8ème arrondissement au lieu dit « descente huitième ». Qu’ont-ils donc fait ces jeunes et pourquoi retiennent-ils notre attention ? Partout où l’homme souffre c’est une partie de l’humanité qui meurt et se meurt. Il y a des choses beaucoup certes plus graves qui arrivent aux Camerounais tous les jours. Très souvent personne n’en parle ! Tenez où en sommes-nous par exemple avec les disparus de Bepanda ? Où en sommes-nous avec la centaine de morts des émeutes de la faim ? Où en sommes-nous avec ceux qui sont à Kondengui parce qu’ils ont osé défier la police communale du Délégué du Gouvernement auprès de la Communauté urbaine de Yaoundé ?

Ma maman m’a dit ce matin qu’elle a des nœuds dans le ventre quand elle y pense, les hommes et les femmes tremblent encore, les fleuves, les arbres de la forêt, les animaux et toutes ces choses qui vont sur terre comme sur mer en tremblent aussi ! Quand on arrive à ce niveau il ya certainement un qualificatif que l’on trouve – ça s’appelle la terreur ! Elle gagne tous les compartiments de l’administration – nous savons tous que le rôle de la police dans un pays n’est pas d’organiser des battus et des rafles collectives sans aucun justificatif à la sortie des boites de nuits. De conduire tous les fêtards dans un poste de police et seulement là leur demander leur pièce d’identité. Ils ont tous eu une contravention avec le motif suivant : Vagabondage nocturne ! Beau motif contre tous ces « nnanga boko » de la poste centrale de Yaoundé, du quartier briqueterie, Tsinga, Ndzong-Melen et la liste ne s’arrête plus. Celle de tous ces quartiers de notre capitale politique qui accueillent tous les exclus de la vie, ceux et celles à qui ce qui nous gouvernent aimeraient offrir un billet en aller simple pour une destination inconnue afin de rendre salubre les déchets de notre incapacité à leur offrir une vie meilleure dans un pays où le PIB par habitant est de 2.400 dollars US et le taux de chômage de 49%.

La misère contre laquelle doit lutter l’homme au quotidien ne doit pas être dissociée de la dignité même de l’homme et de la vie ! Rien ne pourrait rester debout face au mépris de la vie et à l’exclusion de la jeunesse camerounaise des espaces d’expression de leur temps. Les jeunes ont le droit de vivre leur rêve, de penser les nouvelles façons d’être au monde et la police camerounaise se doit de les protéger et non de les violer dans leur dignité. Il est grand temps que les matraques se rangent au profit de la plume et de la pioche pour construire une autre cité. Celles des hommes et des femmes qui chantent l’humanité même face aux grandes tragédies qui ne manqueront pas d’arriver. Nos cris, nos larmes et nos émois doivent être réservés pour d’autres combats, ceux-là plus nobles et justifiées. Ce n’est pas dans les ruines et le chaos que nous devons aller chercher la grandeur du Cameroun, elle est devant nous, dans la jeunesse qui n’est pas accusée au mépris de tout de vagabondage nocturne, mais celle à qui l’on propose de réels moyen d’insertion dans le tissus économique, politique et social du Cameroun. La grandeur du Cameroun n’est pas dans le déploiement excessif et démesuré des forces de police – elle est dans cette capacité de doit trouver cette force de protéger les hommes et leurs biens, pas seulement dans les agglomérations urbaines mais dans chaque bout de terre sans lequel on ne parlerait pas de Cameroun. La grandeur du Cameroun n’est pas dans ce qu’affichent les thuriféraires du régime à vouloir justifier l’injustifiable devant l’implacable réalité des biens mal acquis du premier des Camerounais, elle est dans une démarche d’humilité de tous devant les hôpitaux sans médecins, devant les 400 Camerounais détenus en Lybie. La grandeur du Cameroun est loin d’être dans le débat presque stérile de la place de la diaspora dans la construction du Cameroun mais plutôt dans cette question fondamentale « Que fait le Cameroun pour l’épanouissement et le développement de ses citoyens ? » Le problème de la diaspora devrait se poser en terme d’alternative c'est-à-dire qu’il faudrait que la jeunesse camerounaise ait un choix. Partir n’as de sens que si celui qui souhaite partir a la possibilité de rester. La grandeur du Cameroun est loin d’être dans la dépénalisation de l’homosexualité mais dans le pourquoi de la soumission sexuelle pour la promotion de l’élite camerounaise.

Il n’y a pas pour moi de mots assez forts pour dire aux jeunes du marché central de Yaoundé ce que l’on ressent, combien on se sent proche d’eux. Même sentiments forts mais pas impuissants face à ce qui arrive à ceux et celles qui sont dans nos prisons parfois et très souvent pour des motifs qui ne tiennent pas la route devant la raison. Le préjudice causé par la police certainement très zélée, les verdicts expéditifs rendus par des juges souvent prisonniers d’une idéologie à laquelle ils n’adhèrent pas, le retournement de veste opéré par certains hommes politiques, tous ces actes nous remplissent d’un profond sentiment de tristesse et de honte. Mais nous ne devons pas oublier toute cette masse aujourd’hui silencieuse mais qui demain se re-mettra en marche avec l’unique volonté de chanter auprès de Anne Marie Ndzié « Liberté, Dieu tout puissant – nous sommes libres – Merci ». Comme le disait Mongo Beti, en parlant d’un grand résistant camerounais, l’enjeu pour notre pays n’est pas politique aujourd’hui, nous sommes sur la voie l’unique qui doit nous permettre de retrouver l’âme de notre pays, cette âme est incrustée dans le tissu même des millions de Camerounais qui s’interrogent et s’opposent. Alors laissons s’exprimer tant de vaillance comme on peut le voir aujourd’hui dans la force que trouvent certains de proposer des analyses édifiantes comme Babissakana en économie, ou Francis Kwa-Moutome dans Mutations sur toutes ces histoires de détournement d’argent des pauvres habitants du Cameroun. Dans le Jour Quotidien le Père Ludovic Lado nous édifie sur la nécessité de clarifier le jeu politique au Cameroun – Voila autant de raison d’espérer comme pour dire le premier adolescent venu, s’il est fier et vaillant sera hissé sur le pavois du Cameroun.

Vincent Sosthène FOUDA – Socio-politologue

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