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Publié par Delphine E. Fouda

   La Cité,05/08/2008.Qu'une oligarchie s'accapare le pouvoir est déjà, en soi, mauvais, mais si, en plus, cette dernière le fait, non pas pour construire le pays mais, bel et bien, plutôt, pour le détruire, l'anéantir, alors c'est la catastrophe. Tel est le cas pour l'oligarchie au pouvoir au Cameroun, en cette fin de règne du renouveau. Une oligarchie vicieuse, pernicieuse, haineuse, égocentrique, destructive et plutocrate tient en otage la République... avec l’argent du contribuable et du pétrôle.  Des malicieux pour certains, truands pour d’autres, ont compris le système. A leur tour, ils font désormais chanter cette oligarchie. 
        

 La République est en danger “ Dis moi qui tu hantes, je te dirais qui tu es.”

Il ne faudrait nullement se bercer d'illusions. Les hommes prennent le pouvoir, avant tout, pour en jouir. Néanmoins, ils peuvent, se faisant, s'atteler à améliorer les conditions de vie de la population. En tout cas, c'est ainsi en Afrique. Dans le cas du Cameroun, c'est encore pire. Depuis l'accession de notre pays à l'indépendance, l'oligarchie au pouvoir s'est attelée, essentiellement, à s'enrichir de manière éhontée, sans se préoccuper des conditions de vie de la population.

L'OR NOIR EST EPHEMERE, L'OR VERT EST ETERNEL
La première grande illustration de cette attitude a été l'exploitation du pétrole camerounais, après que le gouvernement français soit parvenu à obtenir d'Ahmadou Ahidjo, le président d'alors, de mettre fin au fédéralisme au Cameroun, afin de laisser à la compagnie française Elf, les mains libres pour cette exploitation.

Au lendemain de 1972, en effet, alors que les Camerounais s'étaient mis à se réjouir du démarrage de l’exploitation du pétrole de leur sous sol, le discours que le président de la République s'était mis à développer a plutôt consisté à leur demander de ne pas se poser de questions sur ce pétrole, sur les quantités produites quotidiennement, le montant de la vente de celui-ci, etc. Les Camerounais se souviennent encore de la singulière déclaration suivante du président de la République, qui leur était demeurée en travers de la gorge : " l'or noir est éphémère ; l'or vert est éternel ". Traduction : continuez à cultiver, sagement, l'arachide, le plantin, le macabo, l'igname.

C'est de là que proviendra notre salut, notre développement. “L'or noir " éphémère camerounais, pour sa part, a vu le produit de ses ventes non budgétisé. Scandale des scandales pour un pays pauvre et arriéré comme le nôtre. Le gouvernement de l'époque avait inventé une astuce comptable à la fois ingénieuse et inédite : le compte hors budget. Ainsi, jusqu'à une date toute récente, les recettes pétrolières du Cameroun n'étaient pas budgétisées. Il aura fallu une injonction énergique de la Banque Mondiale pour que cette aberration puisse, tant bien que mal, être corrigée.

De même, alors qu'il existe un ministère en charge des Mines et de l'Energie au Cameroun, le pétrole de notre sous-sol avait été placé sous la tutelle du Secrétariat Général à la présidence de la République, autrement dit, du président de la République en personne. Résultat, après que le premier président du Cameroun se soit retiré du pouvoir, les Camerounais ont appris, médusés, que celui-ci détenait, bien au chaud, dans un compte bancaire en Suisse, et sous son nom, s'il vous plait, la bagatelle somme de 900 milliards de francs cfa. Choquant.

Mais, dans le même temps, le pays accusait, par rapport à d'autres ayant obtenu l'indépendance au même moment que lui, et pauvres d'égale manière, un retard considérable au niveau des infrastructures. Moins de 2000 kilomètres de routes bitumées, peu d'hôpitaux, peu de lycées, une seule université, 22 années après la proclamation de l'indépendance, électrification rurale inexistante, pas de télévision, etc, etc. Et pourtant, que d'investissements n'aurait-on pas pu réaliser avec un tel pactole. Avec l'avènement du régime du renouveau, on se serait attendu à une correction radicale de ces disfonctionnements.

Malheureusement, il n'en est rien. L'opacité continue à régner dans l'usage des revenus pétroliers. Il aura fallu le scandale de l'acquisition de l'avion présidentiel pour que les Camerounais disposent, enfin, d'une explication sur ces derniers. 40 milliards déboursés, contre l'avis de la Banque Mondiale et du FMI, et par conséquent en catimini, pour cette affaire foireuse. Ils sont également en train d'apprendre, à travers d'autres scandales révélés par la presse, que les fonds du pétrole servent, également, à financer les campagnes  électorales du président de la République. On fait semblant d’inquiéter les responsables concernés alors même qu’après leurs forfaits, ils ont plutôt eu des promotions. Choquant.

L'ENRICHISSEMENT SPECTACULAIRE ET SCANDALEUX DE LA MINORITE AU POUVOIR AUJOURD'HUI
La seconde grande illustration de cette attitude, est, aujourd'hui, la manière dont " l'élite " anti-patriotique s'enrichit, avec la complicité de l'Etat, en ces dernières années du régime du renouveau.

Dans le secteur para-publique, la nomination d'un directeur général de société, se traduit, automatiquement, dans les jours qui suivent, par une hémorragie financière, pour la société d'Etat, d'au minimum, 200 millions de francs cfa : achat d'une à deux VX, 70 millions X 2 = 140 millions, réfection totale jusqu'au mobilier, à coup de dizaines de millions, du domicile que venait, pourtant, d'occuper le prédécesseur,c'est à croire que celui-ci avait le corps entièrement couvert de gale et qu'il faudrait s'en prémunir, déblocage de plusieurs millions de francs pour offrir à boire et à manger aux personnes, ô combien nombreuses, qui viennent adresser leurs félicitations à l'heureux promu, etc.

Dans le cas de la nomination d'un ministre, l'hémorragie financière pour le trésor public est encore plus élevée. Dès que le nom du promu jaillit à la radio, le DAG du ministère concerné, refait, dans les meilleurs délais, l'intérieur de son domicile, commande des caisses et des caisses de champagnes et de whiskies pour couvrir la beuverie qui, des jours durant, va s'en suivre, déblocage par le ministère d'une somme variant entre 30 et 50 millions tenant lieu de prime à la nomination, de souhait de bienvenue dans le cercle restreint des bienheureux de la République, etc.

Une fois en fonction, usage abusif des " crédits de représentation ", (le trésor public camerounais autorise les membres du gouvernement à puiser, à leur guise, la somme d'argent qui leur convient, pour préserver la bonne image du Cameroun, chaque fois qu'ils se déplacent à l'étranger ; c'est pourquoi les ministres accompagnent systématiquement les délégations camerounaises à toutes les rencontres et réunions à l'étranger), et, naturellement, madame, le beau-frère, le cousin, deviennent, immédiatement, prestataires de services numéro un du ministère, au point ou l'on assiste, parfois, purement et simplement, à un transfert budgétaire au bénéfice de ceux-ci.

 Sur un budget d'investissement de 10 milliards de francs, par exemple, il est fréquent de voir un ministre empocher, à travers se proches, prestataires en chef du ministère, 500 millions à un milliard de francs cfa, voire plus, l'an. C'est de cette manière que s'expliquent les fortes sommes qui défilent aux oreilles des Camerounais, toutes les fois où un dignitaire du régime se retrouve entre les mains de la justice.

Avec ce pactole,les membres du gouvernement s'offrent, tous, des châteaux des mille et une nuits à travers la ville de Yaoundé, sans omettre celle du village. Une bonne partie de cette rapine est investie dans l'immobilier, à travers le monde, et planqué dans des paradis fiscaux. Dans le même temps, pas un seul comprimé de nivaquine n'est offert, gratuitement, dans quelque hôpital que ce soit au Cameroun ; de jeunes écoliers se retrouvent assis à dix sur une table-banc, le bitumage des routes se fait au compte goutte, la construction de logements sociaux est inexistante, etc. Mais, la destruction du pays par les " élites " camerounaises ne s'arrête pas là. Elle se poursuit au niveau des moeurs.

MORALITE ZERO

Singulier sort que celui du régime du renouveau finissant. Il s'était placé sous le double signe de la " rigueur dans la gestion et de la moralisation des comportements individuels et collectifs ". Inutile de revenir sur la " rigueur dans la gestion ", le Cameroun ayant été, deux années consécutives, classé champion du monde toutes catégories de la corruption. Il importe plutôt de s'attarder sur la " moralisation des comportements ". Ce régime a plutôt produit tout à fait le contraire de ce qu'il avait annoncé.

 C'est quotidiennement que des histoires de pédophilie et de pédérastie touchant de très hauts dignitaires du régime s'étalent à longueur de pages des journaux et médias. Le président de la République, lui-même, à la faveur d'un discours à la jeunesse un 10 février 2006 au soir, était monté au créneau : " c'est la vie privée des gens… " Quelques jours après, un jeune homme a été défenestré du huitième étage de l'hôtel Hilton. A ce jour, la quasi totalité de ses proches collaborateurs est, une fois de plus, empêtrée dans un scandale du même genre. Aucun nom n'est épargné. Pour tout dire, au Cameroun, question moralité, les " Dieux sont tombés sur nos têtes "

Le pays est traîné dans la boue, à cause des agissements de quelques individus égocentriques. Dans un monde en pleine mutation, où seuls la compétence et la conpétitivité priment, de quelle succession peut-on parler avec une classe politique pernicieuse? Seul le peuple doit décider.

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