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Publié par Le Jour

Le président de la Nationale revient sur le rapport du Ccfd et invite ceux qui soutiennent inconditionnellement le président de la République à retenir qu’ils ternissent l’image du pays.

Il faut savoir raison garder. Je le dis à propos de la folle agitation qui s’empare de certaines régions du pays au sujet de ce qu’il faut bien appeler maintenant l’affaire de la fortune personnelle du président Biya. De quoi s’agit-il ?
Le Comité catholique contre la faim et pour le développement (Ccfd), une Ong française, vient de publier son deuxième rapport sur les biens mal acquis des chefs d’Etat véreux, le premier rapport du genre ayant été diffusé en mars 2007 et c’est dans ce premier rapport qu’Omar Bongo, Obiang Nguema et Sassou Nguesso ont été mis sur la sellette. Le rapport sorti le 24 juin dernier s’intéresse à la situation dans une trentaine de pays sous-développés et au cas de certaines personnalités. Environ trois pages du rapport, sur un total de plusieurs dizaines de pages, sont consacrées au président Biya. Quant au contenu du document, il se présente comme un rappel des faits déjà publiés dans d’autres médias depuis 1983 et qui n’ont jamais été contestés par personne, pas même par le principal concerné, M. Biya.

Mais voici que tout à coup, ceux qui disent soutenir le président Biya se lèvent et déclarent que le rapport du Ccfd n’est qu’un ramassis d’allégations mensongères. Ont-ils mené une enquête qui les aurait conduits à cette conclusion ? Il ne le semble pas. En tout cas ils n’en font pas état. Pourtant, des biens signalés dans le rapport existent bel et bien et chacun peut aller les toucher sur place, comme la grande villa de Bastos dans le voisinage de l’Ambassade des Etats-Unis à Yaoundé. Comme les deux acquisitions immobilières de 1983 rapportées par le Canard Enchaîné. Comme les plantations de Mvomeka’a. On m’a montré à Sangmelima, il y a quelques années, un ingénieur agronome du village de Loum (entre Mengono et Sangmelima) qui avait travaillé dans les plantations en question avec les engins et le matériel d’une société d’Etat appelée Ceenema, ou quelque chose d’approchant. Cet ingénieur agronome est intarissable en anecdotes du temps où il travaillait à Mvomeka’a. Les plantations dont il s’agit existent donc bien. Elles existent d’autant plus que le président Biya lui-même s’y est fait photographier, un sombrero sur la tête, photo publiée dans la presse vers les années 92 ou 93, avec cette belle légende : « Le plus grand agriculteur du Cameroun »…

Devant cette situation scabreuse, je me permets d’inviter respectueusement tous ceux qui veulent s’impliquer dans cette affaire à savoir raison garder.

Il n’est pas exact de dire, ou de laisser entendre que le rapport du Ccfd est une entreprise de dénigrement et de déstabilisation montée contre M. Paul Biya. L’idée d’un complot ourdi contre lui est tout aussi invraisemblable, donc inacceptable. Non seulement l’Ong catholique attire l’attention de l’opinion, indistinctement sur tous les chefs d’Etat suspects de s’être enrichis grâce au pouvoir, mais elle dénonce aussi, avec violence, les pays du Nord qui pratiquent la corruption active sur nos mauvais chefs d’Etat. Il n’ y a, dans ce comportement, rien qui puisse créditer l’idée d’une intention délibérée du Ccfd de nuire au président Biya. Ajoutons que l’Ong catholique n’en veut pas à notre pays, et que le Cameroun n’en est pas en danger à cause de ce qui a été publié dans le rapport du 24 juin 2009. Une certaine façon de soutenir le chef de l’Etat peut, au contraire, non seulement causer du tort à ce dernier, mais représenter un vrai danger pour notre pays. Nous reviendrons plus loin sur ce sujet.
 La situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui doit être clarifiée, et personne d’autre que le président Biya n’est mieux placé pour le faire.

Le président Biya doit s’expliquer devant les Camerounais.

En démocratie, c’est le peuple qui crée le chef de l’Etat, ainsi que l’Etat lui-même. Et il le crée pour en faire son premier serviteur. M. Paul Biya est, de ce fait, le premier serviteur des Camerounais, et pas l’inverse. Et qui dit serviteur dit obligation de rendre compte.

Nous en sommes aujourd’hui au point où les Camerounais doivent demander des comptes à leur serviteur Paul Biya dans l’affaire évoquée plus haut et lui, nous apporter tous les éclaircissements nécessaires à ce sujet. En ne le faisant pas, le président prendrait le risque de traîner ces casseroles toute sa vie comme il l’a fait jusqu’ici, car, le temps n’effaçant rien, n’importe quels médias pourront, demain, faire ce que le Ccfd a fait au moins de juin, alors qu’une franche et loyale explication peut mettre définitivement fin à l’affaire.

Une déclaration unilatérale à la télévision ne constitue pas une franche et loyale explication. Celle-ci, selon moi, doit prendre la forme d’un entretien radio- télévision avec cinq ou six interlocuteurs qui ne soient ni des comparses, ni des accusateurs débridés, mais des citoyens sérieux et responsables comme ne le sont pas ceux qui préconisent un soutien inconditionnel au chef de l’Etat.

Le soutien inconditionnel ou la fin de la République.

Le secrétaire général du parti du pouvoir, M. René Emmanuel Sadi, invite ses ouailles à soutenir inconditionnellement le président. Comment ne pas se demander si ce Monsieur réalise la gravité de son propos et les dégâts qu’il peut causer, combien il peut ternir l’image du Cameroun à l’étranger ?
Un soutien inconditionnel exclut la raison et se fait les yeux fermés, les oreilles aussi, sans se préoccuper de savoir si le président a bien ou mal agi. Comme le griot ou l’esclave, on s’abstient de porter le moindre jugement sur le chef, qui ne peut mal faire. Comme Dieu.
Ainsi déifié, le chef de l’Etat devient le centre de tout. Il régente tout sans que personne ait la moindre prise sur lui, la souveraineté ayant changé de camp et de titulaire pendant que le régime se transformait en République de souveraineté présidentielle. N’est-ce pas ce à quoi ressemble le Cameroun d’aujourd’hui, où le débat démocratique a laissé la place aux motions de soutien inconditionnel provenant de gens qui ne sont plus des Citoyens, mais des griots à genoux ou à plat ventre devant «le dieu du Cameroun.»

© Source : Le Jour
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