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Publié par Delphine E. Fouda

  
Ndzana Seme, africanindependent.com 03/05/2008
 Paul Biya de plus en plus vu comme le vecteur d’un chaos inévitable
 Paul Biya de plus en plus vu comme le vecteur d’un chaos inévitable
Paul Biya a de la peine à constituer son gouvernement post-modification constitutionnelle. Par rumeurs interposées, un combat se livre actuellement entre le clan Meka et le vieux président de la république néocoloniale. Paul Biya ne connaît toujours pas encore la force réelle du G11, notamment la capacité de ce groupe de son entourage en matière de coup d’Etat. Son problème fondamental est de pouvoir diminuer les pouvoirs énormes qu’il a concentrés entre les mains du clan des Fong, dont les Meka sont la face la plus visible. Mais il y a de fortes chances que, quelle que soit sa décision, tout joue à la défaveur de Biya : ceci parce qu’en l’état actuel, le vieux président est devenu l’incarnation du chaos que tous les groupes prétendant au pouvoir cherchent à éviter. Car le chaos ne pourra être évité qu’après l’élimination du vieux président désormais irrémédiablement accroché au pouvoir.

Le clan Meka vient de faire circuler une rumeur qui fait des vagues dans les milieux politiques et diplomatiques de Yaoundé.

Après avoir reçu des informations selon lesquelles Paul Biya, pour une deuxième tentative, envisage de limoger Rémy Ze Meka du poste de ministre de la défense, les Meka en retour répandent la rumeur selon laquelle Paul Biya aurait signé une sorte de pacte de non agression avec le capitaine Guérandi Mbara. Ce qui signifie que Guérandi se serait engagé qu’aucun coup d’Etat contre Biya ne viendrait de lui.

On se souvient en effet que c’est pour nommer Martin Belinga Eboutou comme ministre des finances en remplacement de Ze Meka que le représentant permanent du Cameroun aux Nations Unies était dégommé de son poste de New York le 19 décembre 2007. Il jetait finalement l’ancre, après moult pressions sur le vieux président, au poste de conseiller spécial du président le 22 décembre 2007.

Par rumeur interposée en retour, Paul Biya laisse aussi entendre qu’à défaut de Martin Belinga Eboutou que les Meka n’acceptent pas, il nommerait à ce poste stratégique un directeur général actuel d’ethnie Bulu et originaire du Sud. Ce qui a aussitôt créé un effet de panique chez les Meka, qui concluent que Paul Biya aura ainsi rompu le pacte qu’il a conclu avec ces cousins de Jeanne Irène Atyam selon lequel les Fong seront ses protecteurs jusqu’à ses derniers jours.

Raison pour laquelle en réplique, les Meka ont adopté une stratégie astucieuse. Celle-ci tente notamment, non seulement à justifier leur soudaine libération des officiers, soldats et civils arrêtés en octobre 2007 pour un faux complot de coup d’Etat dont l’enquête n’avait abouti nulle part, à semer la confusion dans les rangs d’une bonne partie de l’armée que Ze Meka, son oncle le général de division René Meka et le délégué général à la sûreté nationale Edgar Mebe Ngo’o sentent pertinemment comme des fidèles au capitaine de Ouagadougou. Ceci pour en contrepartie renforcer les rangs des officiers de l’armée qui leur sont fidèles, prêts que ces derniers seraient depuis des mois à liquider le vieux président camerounais pour prendre le pouvoir.

Ils entendent ainsi semer le doute dans les esprits des fidèles de Guérandi - qu’ils soupçonnent nombreux au sein des forces armées camerounaise mais sont incapables d’identifier malgré l’arrestation, la détention et la torture pendant 5 mois de ceux qu’ils croyaient en être les cerveaux – en présentant, comme le gouvernement l’a toujours fait pendant des décennies, le capitaine comme incapable d’un quelconque coup d’Etat ; avec en primeur cette fois la fausse information selon laquelle Biya aurait signé un pacte de non agression avec Guérandi.

Suivant cette nouvelle stratégie des Meka, Paul Biya est présenté comme un ennemi positionné contre la tribu élue par Dieu pour détenir le pouvoir au Cameroun. Nos sources se demandent alors quelle est la véritable couleur d’une telle tribu élue : Beti, Bulu ou Fong.

Car la réalité actuelle – qui prendrait alors des proportions imprévisibles si Atangana Mebara était réellement arrêté et emprisonné, dès lors que beaucoup soutiennent que l’ancien SG de la présidence n’aurait rien détourné – est que les divisions entre les Beti et Bulu au sein du pouvoir ont de plus en plus grandi. Les élites Beti se demandent en effet si les nominations de Paul Biya sont encore attractives pour eux, dès lors que le président Bulu n’hésite pas à sacrifier ses anciens ministres et hauts fonctionnaires Beti pour se maintenir au pouvoir.

Notons bien que les Fong sont considérés comme un sous-groupe ethnique Beti. Ceci n’est pas le cas des Bulu, que certains chercheurs ont souvent présentés comme un peuple congoloïde venu plutôt du Sud ; et qui n’aurait donc pas traversé le Yoóm, le fleuve mythique qu’aurait franchi le peuple des « Nobles », mais aussi celui des Bassa et d’autres groupes, sur le dos du Ngáng Medzáa (présenté comme un python ou un arc-en-ciel).

Les Bulu sont surtout présentés dans l’histoire du Cameroun, notamment dans les recherches du révérend père Engelbert  Nveng (que Biya fit assassiner en 1995), comme les complices des esclavagistes européens lors du Commerce Triangulaire. La marchandise des esclavagistes Bulu était alors essentiellement composée des jeunes hommes et femmes Beti les plus robustes, livrés sur les côtes de Campo et Kribi. Raison d’ailleurs pour laquelle certains tribalistes viscéraux Bulu, dont notamment Fame Ndongo et feu Charles Assalé, appelaient les Beti les « Betit » (les animaux) quand Biya avait une fois décidé d’éloigner « les Nobles » de son pouvoir en fin des années 1980.

Les Bulu sont en effet connus au Sud Cameroun pour leur particularité de se vanter comme ceux qui ont « vu le Blanc » les premiers ; un argument que l’on trouve aussi couramment chez les Douala et les Bakweri, dont les royaumes sont également connus historiquement comme les collaborateurs des esclavagistes occidentaux.

Gardons en esprit que, à l’image de Gorée au Sénégal, les esclavagistes occidentaux tenaient un grand centre de rassemblement des esclaves-marchandises sur l’île de Fernando Pó aujourd’hui appelée Malabo. Les esclaves Beti, Bassa, Bamiléké, et des multiples tribus du Sud, du Centre et du Grand Ouest actuels étaient alors dirigés vers les plantations du Brésil, du moins pour la moitié d’entre eux qui avaient la chance d’arriver à destination…

Dans les milieux Beti proches du pouvoir, l’on cite notamment parmi les sacrifiés, feu Nkolo Fanga, Edzoa Titus, Roger Belinga, Ondo Ndong, et récemment Olanguena Awana et Abah Abah ; sans compter les nombreux cadres et hauts fonctionnaires Beti qui accompagnent toujours de telles « élites » dans les prisons. Chacun se demande donc à qui reviendra le tour comme bouc émissaire la prochaine fois que Paul Biya sera mis en difficulté de perdre son pouvoir.

Dans les forces armées, c’est la même division qui s’observe au sein de ceux qui se déclarent du coté de Paul Biya. Car, si le G11 réalisait son coup d’Etat en éliminant Paul Biya pour prendre le pouvoir, ceux des officiers, soldats, gendarmes et policiers qui vouent un soutien indéfectible à Paul Biya, notamment parce que le vieux président leur assure une impunité et une réputation qu’ils n’espèrent pas obtenir de quiconque d’autre, craignent qu’ils seront tout simplement éliminés en même temps que Barthélémy.

Puisque de tels supporters indéfectibles de Paul Biya ne se laisseront pas faire, le coup d’Etat du G11 n’éviterait donc pas de se solder par un bain de sang, autant dans l’entourage de Paul Biya qu’à travers le pays si les choses dégénèrent en guerre civile.

Une constante se dégage cependant, à savoir la voie devenue incontournable de devoir renverser Paul Biya par la force. En effet, ce dernier a démontré clairement qu’il entend s’accrocher au pouvoir jusqu’à son dernier souffle. La stratégie de ne se faire aucun ami, même dans son entourage, semble être ce qui jouera en défaveur du vieux chef d’Etat. Car il a oublié que les gens ont tendance à imiter leurs dirigeants : si tu ne fais pas confiance aux gens, les gens ne te feront pas confiance.

Au stade actuel des enjeux au sommet de l’Etat camerounais, il est clair que personne ne croit à la sincérité de Paul Barthélémy Biya pour la lutte contre la corruption et les détournements des biens publics dans le cadre de la fameuse « opération épervier ».

Le journal local Le Messager, citant un haut commis de l’Etat réagissant aux allégations selon lesquelles les organisations dites charitables de Chantal Biya sont financées par les « cotisations » forcées des personnes nommées par son mari de président, publiait la réponse suivante : « En ce sens, le président de la République lui accorde une dotation particulière pour ses activités associatives et humanitaires. »
Cette assertion a été confirmée par certaines de nos sources gouvernementales.
L’on se demande donc quelle est cette « dotation particulière »
que le chef d’Etat camerounais aurait accordée aux activités sérieusement douteuses de son épouse. Une telle dotation figure-t-elle sur le budget de l’Etat du Cameroun ? Ceci voudrait-il clairement dire que les contribuables camerounais sont entrain de payer par leurs impôts les activités associatives et humanitaires de Chantal Biya ?

Toujours est-il que la présidence de la république de Paul Biya n’hésite pas à présenter Chantal Biya comme une dirigeante du Cameroun, du moins à regarder la place que cette ancienne prostituée des rues de Yaoundé du début des années 1980 occupe sur le site Internet de la présidence.

En effet, la couverture de
Chantal Biya : La passion de l’humanitaire
, un livre écrit par une journaliste « gombiste » complètement inconnue de la scène mondiale des auteurs, présentée comme d’origine  franco-belge du nom de Beatrix Verhoeven, couvre la quasi entièreté du site web de la présidence, en plus des pages des audiences de la « première dame » qui font concurrence à celles du président de la république. Il apparaît donc que le vieux président n’a plus à jouer que la carte de son épouse, au moment où tout le monde au Cameroun est convaincu que Paul Biya est un homme sans ami, un homme seul.

Car, s’il arrive que l’intérêt de conservation de son pouvoir le lui commande, Paul Biya n’hésiterait pas à se débarrasser aussi de Chantal Biya… comme il le fit sans hésitation avec Jeanne Irène.
Seul contre tous, contre le Peuple camerounais et contre son propre entourage, Paul Biya concentre en effet sur sa personne tous les ferments du chaos qui menace actuellement le Cameroun. Un pays que le vieux président se plaît cependant, le plus ironiquement qu’il soit, à présenter comme un îlot de paix grâce à lui.
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